Un premier debrieffing

Publié le par HRP

La Transpyrénéenne 2008 s'est arrêtée prématurément, mais au-delà de cet échec dans la tentative de traversée ultra-rapide des Pyrénées, nombre de points très intéressants se sont dégagés. Voici donc un premier debrieffing de l'aventure.

Performance réalisée

Stephane : 434 km et 25 500 m D+ - 147 h 30 mn de course - arrêt sur périostite au km 310 du parcours
Olivier : 427 km et 24 500 m D+ - 136 h de couse - arrêt sur contracture quadriceps suite à tendinite du releveur, au km 303 du parcours
Emmanuel : 265 km et 14 000m D+ - arrêt suite à douleurs aux deux genoux (ménisque + tendinite) au km 197 du parcours

Faisabilité des moins de 10 jours

La faisabilité du défi était au cœur du débat avant notre départ. Force est de constater que nous repartons tous les trois avec la conviction que les moins de 10 jours sont parfaitement accessibles… hors blessure invalidante. Au bout de 6 jours, Stephane et Olivier avaient parcouru 430 km à une vitesse nous menant sur la base de 9 jours et demi à Banyuls, sachant que nous avons perdu beaucoup de temps en jardinage (passages dans des champs serrés de ronces, blocage prolongé au pied du pas du Lavédan…) et en orientation, et que nous n’avons pas optimisé parfaitement l’agenda de la journée (départs et couchages trop lents (nous profitions du confort apporté par notre assistance), arrêts sur ravitos intermédiaires trop longs…). De plus, le parcours peut être grandement optimisé par endroits, par exemple à Arrémoulit.
Un groupe de notre niveau filant droit sur le parcours optimisé flirterait sans doute avec les 8 jours. Un groupe de coureurs de plus haut niveau pourrait aller bien en-deçà. Les 6 jours que Benoit Laval annonçait lorsqu'Emmanuel l'a interviewé nous semblent dans le domaine du possible.

Le physique

Un point qui ne surprend personne et surtout pas nous : le premier facteur limitant est la blessure. Il semble difficile d’infliger une telle dose d’efforts sans blessure. Mais il est possible d’avancer avec, tout du moins selon le type et le degré de blessure. Olivier a souffert de sa tendinite au releveur du pied gauche dès le troisième jour. Il a composé avec jusqu’au matin du sixième.
Pour les autres points du physique : que des bonnes surprises. La caisse est demeurée intacte pendant ces 6 jours. Aucune fatigue musculaire, aucune douleur (pas de courbature du tout en particulier). Pas de sensation d’être limité par le souffle ou la puissance. Nos vitesses de bases étaient identiques jour après jour. Pas de lassitude qui soit apparue.
Le manque de sommeil ne s’est pas manifesté outre mesure : les 4 à 6 h de repos quotidiennes se sont avérées suffisantes pour ne pas s'endormir en courant (excepté le troisième soir pour Emmanuel). Par contre, une fois l'épreuve terminée, tous les participants se sont trnasformés en véritables loirs, ponctuant la journée d'un grand nombre de siestes.
Côté pieds, Olivier n'a que peu souffert, Stéphane et Emmanuel on été moins gâtés, notamment à cause d'un mauvais choix de chaussures le premier jour. De plus, Olivier a énormément pris soin de son outil de travail, avec un changement très régulier de chaussettes (3 fois pas jour en moyenne) et l’utilisation massive de NOK (une couche pour hydrater (faire pénétrer), et une couche pour lubrifier).

Le mental

Malgré les nombreux coups du sort dont nous avons été victimes, le mental a toujours été tourné vers la réussite. On se prenait un mur ? Pas de problème, on le contournait et repartait de plus belle. La cohésion est resté très forte de bout en bout. En tant qu’orienteur, Olivier se sentait responsable des quelques gros loupés qui nous ont fait faire des détours importants ou des passages douloureux dans les épines. Malgré de petits accablements, voire parfois de l'énervement, la solidarité l'a toujours emporté. Dans ces moments difficiles, c’était une condition incontournable de succès. Il faut bien préciser qu'Olivier s'est retrouvé "orienteur par défaut", Stéphane et Emmanuel connaissant mal le parcours et maîtrisant mal l'utilisation du GPS de rando. Par conséquent, reprocher de mauvais choix à Olivier aurait été gonflé.
Notre résistance à la douleur a été digne de ce que l’on trouve usuellement chez les coureurs d’ultra. La douleur n’a réellement été un problème que quand elle a eu un impact important sur la performance : Emmanuel s'est arrêté lorsqu'il a compris que ses genoux l'empêcheraient de maintenir un rythme suffisant lors des journées restantes pour suivre ses compagnons.

L’assistance

Alors là, nous avons été bluffés par un si haut niveau d'assistance : une merveille du début à la fin. Les quatre "assistants" ont eu un rôle absolument essentiel durant la semaine. Les soins d’ostéopathie sont un plus indéniable… peut-être sont-ils même indispensables. Le dialogue sur notre état avec les ostéos a été très riche. Leurs manipulations prenaient parfois un caractère magique tellement elles étaient efficaces.
Outre les aspects purement logistiques, les ravitaillements étaient des havres de sociabilisation dans des journées de brutes. Bref, ils faisaient du bien à la tête.
Il a presque fallu se fâcher pour qu’ils aillent prendre un peu de repos, car ils allaient même trop loin.
Nous avons pu attaquer nos journées bien nourris, soignés, propres. Leur investissement était total. Nous nous étions bien dit qu’il fallait que les 7 forment une équipe indissociable et non pas une équipe de 3 coureurs et une équipe de 4 assistants. Nous y sommes parvenus au-delà des espérances. Nos larmes mélangées lors du renoncement définitif en témoignent plus que tout discours.

La préparation

Physiquement, nous étions au point. Notre organisation n’a eu besoin que de petits ajustements rapidement acquis. Malheureusement, 2 points ont été insuffisants :
- Olivier n'a pas eu assez de temps pour faire contrôler les choix d’itinéraire par des gens connaissant bien le coin. De ce fait, l’itinéraire n’a pas été aussi direct qu’il le pouvait (col de la Fâche), il manquait des plans B pour les passages un peu risqués comme les crêtes du pic d’Orhy, et il restait des options belles sur le papier mais incommodes sur le terrain (essentiellement des sentiers qui figurent encore sur les cartes, mais pas sur le terrain)
- nous avons eu le GPS quelques jours avant le départ et donc pas assez de temps pour l’intégrer dans la pratique de l’orientation. Olivier s'est un peu trop reposé dessus, perdant parfois le sens du terrain qui est beaucoup plus développé quand on s’oriente sur carte. Il lui a fallu trois jours avant de trouver le bon positionnement de l’outil dans son orientation. Le GPS est très précieux, mais il ne fait pas tout. Il faut garder l’intelligence du terrain, d’autant que nous avons perdu le fond cartographique dès le deuxième jour.

Conclusion

Ce fut une semaine incroyable. L’équipe a été une vraie force. Ce genre de défi, déjà difficile, doit être impossible sans une équipe de ce type. Le suivi de notre avancement par les internautes nous a permis de sentir beaucoup de monde derrière nous, ce qui nous a franchement aidés. Nous avons pris beaucoup de plaisir.
Les huit à dix jours seront atteints bientôt, ça semble être chose certaine… pourquoi pas par nous-même l’an prochain ?

Publié dans Débrieffing

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